Plongée dans les mystères du web profond

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La plupart des utilisateurs d’Internet ne le savent pas, mais les sites qu’ils ont l’habitude d’explorer avec des navigateurs classiques et à travers les moteurs de recherche les plus connus ne représentent qu’une fraction de la totalité des contenus en ligne. Car, sous la surface, se dissimule ce qu’on nomme le « web profond », un sous-ensemble Internet qui est le territoire des données non indexées, de l’anonymat et des activités criminelles.

Du web de surface au web immergé

Pour parler du web profond, ou « Deep web » en anglais, on use et abuse souvent d’une métaphore glaciale : celle de l’iceberg. Imaginez qu’Internet ait la structure de l’un de ces vastes objets flottants qui causèrent tant de mal au Titanic. La partie émergée représente tout le web classique, 99,9 % des sites que vous consultez au quotidien : actualités, mails, plates-formes de partage, réseaux sociaux.

Mais, comme vous le savez si bien, le plus gros morceau d’un iceberg se cache sous l’eau : c’est la partie immergée. C’est là qu’on trouve le web profond : un sous-ensemble d’Internet que les moteurs de recherche traditionnels n’indexent pas, ou indexent mal. Ce sous-ensemble possède plusieurs couches :

  • Une première couche à la limite de la surface, un peu underground mais pas trop, toujours accessible via Google, Yahoo et consorts. Par exemple, il s’agit des sites de téléchargement de torrents ou des plates-formes de streaming.
  • Une deuxième qui constitue l’essentiel du web profond, laissée de côté par les moteurs de recherche.
  • Une troisième et dernière couche, plus profondément enfouie, qui correspond à ce qu’on appelle le « Darknet », un Internet obscur où l’on peut accéder à presque tout ce qui est imaginable (et illégal).

Là où la métaphore de l’iceberg se révèle parlante, c’est que le contenu de ce web invisible est considérablement plus important que celui du web de surface. On estime généralement que ce contenu est 550 fois plus abondant. Les chiffres les plus optimistes parlent d’un ratio de 80 % pour le « Deep web » ; d’autres tablent plutôt sur 96 %…

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Que contient le web profond ?

Mais que trouve-t-on dans cet Internet que les moteurs de recherche classiques n’indexent pas ? Un contenu hétérogène : bases de données, bibliothèques volumineuses, pages mal construites ou éphémères, sites rendus volontairement inaccessibles par leurs créateurs… Bref, tout ce contenu qui n’est pas motivé par des mesures de popularité – mesures sur lesquelles s’appuie Google pour son référencement.

Les moteurs de recherche sont comme des radars, à ceci près qu’au lieu de repérer des mouvements, ils perçoivent les signaux de popularité. C’est une approche doublement pragmatique : d’abord, parce que le but d’un moteur consiste à fournir à l’internaute un résultat pertinent par rapport à sa recherche ; ensuite, parce qu’il serait impossible d’afficher la totalité des pages existantes.

Cet angle d’attaque privilégié par les moteurs de recherche a, de fait, dessiné une ligne de séparation entre les pages bien indexées et celles qui ne le sont pas, ou qui choisissent de ne pas l’être. Et là est toute l’astuce : les contenus du web profond se glissent volontairement sous l’horizon de visibilité des moteurs afin de rester confidentiels, et de n’être visités que par des surfeurs anonymes et consentants.

On trouve donc trois types de contenus dans le web profond :

  • De la donnée légitime, hautement spécialisée (par exemple des bases de données scientifiques volumineuses et profondes), qui est mal indexée ou pas indexée du tout ;
  • De la donnée sécurisée inaccessible sans les mots de passe et les autorisations ad hoc;
  • De la donnée clandestine qui a trait à toutes sortes de trafics et d’activités criminelles. Hackers et spécialistes du phishing y pullulent.

Évidemment, ces contenus étant volontairement difficiles d’accès, il est compliqué de les trouver via les navigateurs classiques. Les candidats à la plongée dans les abîmes de la Toile utilisent généralement des navigateurs spécifiques, le plus connu étant Tor.

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L’Internet des profondeurs et ses dérives

Au départ, le web invisible est le lieu privilégié des opposants politiques qui ont toutes les raisons de vouloir rester cachés sous les radars officiels, mais aussi des utilisateurs désireux de protéger leur vie privée en surfant de façon anonyme. À l’heure où la protection des données est en train de devenir un enjeu majeur du numérique, ce web invisible apporte une forme de sécurité.

Mais, rapidement, ces profondeurs non indexées sont devenues les terrains de jeux des hackers, des hors-la-loi, des dealers et des criminels de tout poil. Et une partie du web profond s’est transformée en « web obscur », une couche dédiée à tout ce qu’on peut trouver de pire :

  • Des données confidentielles dérobées aux individus ou aux entreprises ;
  • Des sites pour acheter tout et n’importe quoi : armes, drogues, faux papiers, fausse monnaie, etc., le tout payable en bitcoins ;
  • Des plates-formes de dons à des organisations terroristes ;
  • De la pédopornographie ;
  • Des hackers prêts à lancer des attaques à votre place contre rémunération ;
  • Des tueurs à gages…

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Web profond contre web obscur

Contrairement au web profond, le « Darknet » est une source d’inquiétude constante pour les gouvernements et les organisations policières internationales, qui peinent à trouver des chemins d’accès pour aller y faire le ménage. Leur grande peur réside surtout dans l’usage qui en est fait par les groupes terroristes, qui ont l’habitude de communiquer via le web obscur.

Néanmoins, la récente affaire Silk Road semble indiquer que les acteurs majeurs du « Darknet » ne sont pas complètement à l’abri des représailles judiciaires. Ross Ulbricht, le créateur d’un site de vente de drogues, Silk Road, a été condamné en 2015 aux USA à la prison à perpétuité (voir ici).

Pas de panique, cependant : si tout ce qui vous intéresse, c’est le web des profondeurs, son anonymat limité et ses volumes considérables d’informations difficiles à trouver, vous n’avez rien à craindre des efforts déployés par les polices internationales pour remuer les fonds marins de l’Internet. Quant à savoir comment y accéder, vous trouverez une méthode officielle sur cette page et dans cette vidéo :

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