Faut-il avoir peur du robot AlphaGo ?

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L’AlphaGo de Google marquerait-il une étape décisive sur le chemin qui mène au développement d’une véritable intelligence artificielle ? La machine qui gagne au jeu de go préfigure-t-elle un avenir à la Terminator ? Ces victoires du robot sur l’homme ont généré un mélange de fascination et de frayeur, comme c’est souvent le cas. Mais tout indique qu’il ne faudrait pas, pour autant, avoir peur du grand méchant AlphaGo.

AlphaGo, go, go !

C’est donc une machine qui a remporté la partie. Il y a vingt ans, le champion du monde des échecs, Gary Kasparov, était vaincu par l’ordinateur Deep Blue, créé par IBM. En ce début d’année, c’est le meilleur joueur mondial de go, le Sud-Coréen Lee Sedol, qui a été battu par une autre machine, AlphaGo, programmée précisément dans ce but.

Pour la 2e fois, un ordinateur s’est avéré capable de prendre l’ascendant sur un esprit humain, dans un jeu volontiers considéré comme étant l’un des plus complexes au monde. En effet, la simplicité apparente du jeu de go, inventé en Chine il y a 3 000 ans, est contrebalancée par un nombre possible de mouvements quasiment infini. On estime ce nombre à 10 puissance 171 !

L’événement est déjà surprenant en soi. Mais il y a plus fascinant encore, car autant Kasparov avait tenu le choc contre Deep Blue, remportant certaines parties, autant Lee Sedol n’a pu voler qu’une seule victoire à son adversaire fait de boulons. C’était certes mieux que les 5 manches à 0 perdues par le champion européen, Fan Hui, en octobre 2015, mais tout de même.

Alors, AlphaGo sonne-t-il le glas de l’intelligence humaine ?

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Le pari fou de Google

Pour répondre à cette question, il faut d’abord aller voir du côté des créateurs d’AlphaGo. L’intelligence artificielle n’est pas un marché de niche : tous les grands noms qui officient dans le domaine des nouvelles technologies et de l’informatique se sont penchés sur le sujet. Tous cherchent à développer une intelligence plus élevée, plus performante, et plus indépendante, que celle des autres.

Déjà bien placé sur le secteur de la voiture autonome, Google a sérieusement devancé ses concurrents – IBM et Microsoft, mais aussi Amazon et Facebook, qui ont leurs propres projets. C’est le rachat du britannique DeepMind en 2014, une entreprise de tech spécialisée dans l’intelligence artificielle, qui a permis à la firme de Mountain View de jouer quelques coups d’avance sur ses rivaux.

Afin de prouver leurs aptitudes en matière d’IA, les ingénieurs de chez Google se sont donc lancés un incroyable challenge : programmer un ordinateur pour qu’il parvienne à vaincre un champion au go, le jeu le plus complexe de tous, à côté duquel les échecs s’apparentent à une banale marelle. Et, surtout, offrir à cet ordinateur les moyens d’apprendre de ses erreurs au fil des parties.

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L’avenir de l’intelligence artificielle

Au-delà du défi lancé à l’esprit humain, il y a une question fondamentale : est-on capable d’enseigner à une machine à évoluer en fonction des parties jouées ? La réponse était censée déterminer notre positionnement sur l’échelle qui mène à une intelligence artificielle véritable. Et nous dire si nous pourrions bientôt rejoindre les romans d’Isaac Asimov et les films de Steven Spielberg.

Pourquoi tant d’énergie dépensée pour créer des machines capables de gagner à des jeux de société ? C’est que ces firmes de high-tech espèrent bien, un jour prochain, parvenir à fabriquer un ordinateur qui imiterait à la perfection le cerveau humain. Qui pourrait apprendre, se développer, gérer des milliers d’informations à la fois, s’adapter à son environnement, voire se réparer lui-même.

Est-ce la promesse d’une prochaine invasion de robots intelligents ? Notre iPhone sera-t-il capable, dans quelques années, d’avoir une vraie conservation avec nous, et pas seulement les réponses étranges et partielles de l’actuel Siri ?

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Il ne faut pas mettre les boulons avant les circuits

Pour nombre de commentateurs, le triomphe d’AlphaGo doit être relativisé. D’abord, parce que la machine qui a remporté la victoire n’est, précisément, qu’une machine : elle a été programmée en amont par des humains. Dans un sens, c’est donc l’intelligence humaine qui a gagné, car elle a donné les armes à la machine pour qu’elle puisse prendre l’ascendant sur le champion.

Ensuite, et surtout, il reste que AlphaGo ne relève pas exactement de l’intelligence artificielle au sens strict, comme on peut le lire dans cet article. Il manque encore à l’ordinateur deux choses essentielles : la raison et la conscience du jeu.

La victoire d’AlphaGo n’a été rendue possible que par l’intégration des résultats de millions de parties jouées contre lui-même, et par la prise en compte des meilleures combinaisons possibles qui en résultent. La machine, contrairement à l’homme, peut stocker des quantités astronomiques d’informations et de mouvements, ne fatigue jamais… et ne connaît ni l’orgueil, ni la pression !

Quelques jours avant de jouer contre AlphaGo, Lee Sedol se vantait de pouvoir l’écraser en 5 parties, voire 4 pour se laisser un peu de marge. La défaite n’en fut que plus cuisante. La machine, elle, n’a pas ce défaut : elle ne sait pas narguer son adversaire, ni pérorer dans les médias. Elle est tout entière focalisée sur son seul objectif : gagner au jeu de go. C’est sa grande force. Mais c’est aussi sa limite.

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